Béatrice Touchelay,
La contribution du service central de la statistique publique française à l’insertion de la France dans les échanges internationaux de 1946 à 1961
Avec l’ouverture des frontières, l’instauration de l’Europe des Six et la décolonisation, le commerce extérieur de la France change radicalement entre 1946 et 1961. Cette période correspond à la présence du premier directeur général de l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE), créé à la Libération pour accélérer la reconstruction puis la modernisation de l’économie française. Cet Institut doit élaborer et diffuser des informations quantifiées portant sur l’activité intérieure et sur celle de l’étranger afin que les gouvernants et les chefs d’entreprise puissent prendre des décisions rationnelles. Doté d’une mission d’étude, il représente également la France hors des frontières et contribue aux travaux statistiques mondiaux. La réussite de cette double mission (d’études économiques et de producteur de données) suppose d’abord que les responsables politiques et économiques de la Nation accordent aux fonctionnaires-statisticiens des moyens financiers et des soutiens moraux suffisants. Elle exige ensuite qu’ils puissent obtenir les renseignements qu’ils réclament aux administrations et aux producteurs. Or, à quelques exceptions près, ni la classe politique ni les chefs d’entreprise n’ont conscience de la nécessité de la statistique. Du fait de l’insuffisance des crédits de l’INSEE et des réticences ou de l’indifférence de l’opinion à son égard, les structures de l’économie nationale restent en partie méconnues en 1961 tandis que l’observation des pays étrangers n’est prise en charge par aucune administration centrale. Si la qualité scientifique des travaux des statisticiens français est largement reconnue à l’étranger, cet atout n’est pas valorisé par la France. Les entreprises nationales affrontent leurs concurrents en les méconnaissant largement.
After the frontiers had opened, the Common Market had been founded and decolonization had started, the French foreign trade completely changed between 1946 and 1961. This period corresponds to the presence of the first general director of the National Institute of Statistics and Economic Studies (INSEE), which was founded at the time of the Liberation in order to speed up the reconstruction and the modernization of the French economy. This Institute has to produce and spread quantified information about economic activity both at home and abroad so that government and company managers might make rational decisions. With a charter for research, it also represents France abroad and contributes to the world statistical work. Making a success of this double mission (technical and scientific) requires first that the political and economic leaders of the nation provide the statisticians-civil servants with adequate financial means and enough moral support. It also requires that they might be able to obtain the information they request from government offices and from producers. But with a few exceptions, neither the politicians nor the company managers are aware of the fact that statistics are necessary. Because the credits granted the INSEE are inadequate and because of the reserve and indifference of public opinion toward it, the structures of the national economy remain partly unknown in 1961, while the observation of foreign countries is taken care of by none of the central government offices. Although the scientific quality of the work done by French statisticians is a widely accepted fact abroad, this asset is not highlighted by France. National companies confront their competitors, knowing very little about.